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Protection du lanceur d’alerte de bonne foi qui ne respecte pas la procédure d’alerte graduée en cas de dénonciation de faits constitutifs d’un crime ou d’un délit (Cass. Soc. 15 février 2023, n°21-20.342)

20 mars 2023

Le salarié qui relate ou témoigne de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont il aurait eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions a-t-il l’obligation de respecter l’alerte graduée prévue par l’article L. 1132-3-3 du Code du travail dans sa rédaction issue de la loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016 ?

Telle est la question que vient de trancher la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 15 février 2023 (n°21-20.342).

En l’espèce, une salariée engagée en qualité de surveillante de nuit au sein d’une maison d’enfants à caractère social effectue un signalement à l’inspection du travail. A l’occasion d’un contrôle au sein de l’établissement, la salariée remet la copie d’un courrier adressé par l’équipe éducative aux responsables de l’association pour dénoncer de possibles agressions sexuelles commises par des enfants sur d’autres.

Informé par l’inspecteur du travail, le procureur de la République ouvre une première enquête pour agression sexuelle sur mineurs classée sans suite pour absence d’infraction, puis une seconde enquête visant la salariée et le délégué syndical pour dénonciation mensongère, elle aussi classée sans suite, au motif que l’infraction est insuffisamment caractérisée.

Considérant que son licenciement est en lien avec la dénonciation des manquements constatés au sein de l’établissement, la salariée saisit la formation de référé de la juridiction prud’homale pour obtenir sa réintégration.

L’employeur forme un pourvoi en cassation et invoque le fait que le salarié qui entend dénoncer des actes illicites dont il a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions doit respecter une procédure graduée, qui subordonne la saisine directe d’une autorité judiciaire ou administrative, soit à l’absence de réaction de l’employeur à un signalement interne, soit à la preuve d’un danger grave et imminent ou d’un risque de dommages irréversibles.

Au cas particulier, l’employeur fait valoir que la salariée était informée du traitement de son alerte par la direction qui avait procédé à une enquête qui avait révélé la pratique de jeux à connotation sexuelle par les enfants, sans abus ni agressions sexuels et avait décidé, avec l’équipe éducative, des mesures à prendre pour mettre un terme à ces jeux et prévenir toute dérive.

La Cour de cassation, au visa de l’article L. 1132-3-3 du Code du travail dans sa rédaction issue de la loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016, rejette le pourvoi de l’employeur en établissant une distinction entre le premier alinéa et le deuxième alinéa du texte dans sa version alors applicable. Elle rappelle que le salarié qui relate ou témoigne de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont il aurait eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions (alinéa 1er) n’est pas tenu de signaler l’alerte dans les conditions prévues par l’article 8 de la loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016 organisant une procédure d’alerte graduée (alinéa 2).

Partant, la Cour de cassation approuve la Cour d’appel d’Aix-en-Provence d’avoir jugé que la protection de la salariée licenciée pour avoir dénoncé des faits susceptibles de constituer des agressions sexuelles n’était conditionnée qu’à sa bonne foi, rappelant au demeurant que la mauvaise foi ne peut résulter que de la connaissance de la fausseté des faits dénoncés et non de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis, ce qui n’était pas caractérisé.

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