Menu
Flash Info

Le salarié qui dénonce un délit ou crime dont il a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions n’a pas à agir de manière désintéressée pour bénéficier de la protection prévue à l’article L. 1132-3-3 du Code du travail

25 septembre 2023

(Cass. Soc., 13 sept. 2023, n°21-22.301)

Auteur

Le lanceur d’alerte bénéficie d’un statut protecteur qui s’impose à l’entreprise. Les conditions pour acquérir ce statut ont été instaurées par la loi Sapin II du 9 décembre 2016. Jusqu’au 1er septembre 2023, le salarié devait ainsi agir, non seulement de bonne foi, mais également de manière désintéressée.

Parallèlement, l’article L. 1132-3-3 du code du travail attribuait (et attribue toujours) une protection similaire aux personnes ayant témoigné, de bonne foi, de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont elles ont eu connaissance dans l’exercice de leurs fonctions. La condition afférente au désintéressement n’était donc pas reprise (et ne l’est toujours pas).

Dans ces circonstances, la question posée à la Cour de cassation statuant sous le régime de la loi de 2016 était la suivante : le salarié qui témoigne de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont il a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions doit-il agir de manière désintéressée pour bénéficier du statut protecteur ?

La Cour de cassation a répondu par la négative dans une décision du 13 septembre 2023 confirmant ainsi son interprétation stricte des dispositions de l’article L. 1132-3-3 du code du travail (cf. Cass. Soc., 1er juin 2023, n° 22-11.310 : que la simple dénonciation de faits « pouvant recevoir une qualification pénale » ne suffisait pas à accorder la protection au lanceur d’alerte, les faits devant impérativement être constitutifs d’un délit ou d’un crime). 

En l’occurrence, un directeur des opérations avait été licencié pour faute grave aux motifs de menaces et chantages à l’égard de la direction de la société en considération de courriers adressés à celle-ci pour l’aviser de faits illicites relevant de la sécurité (en l’occurrence, la vente de prestations de sécurité par une société non autorisée) et l’informer des démarches qu’il entendait entreprendre auprès des autorités de contrôle et du procureur de la République.

Le salarié avait contesté son licenciement devant la juridiction prud’homale aux fins d’obtenir sa nullité au titre de la protection due aux lanceurs d’alerte prévue à l’article L. 1132-3-3 du code du travail. Le conseil de prud’hommes avait jugé le licenciement nul, et avait été à ce titre suivi par la Cour d’appel de Paris (CA Paris ,8 juillet 2021, n°19/05410).

La société avait porté l’affaire devant la Cour de cassation affirmant que les conditions ouvrant droit à la protection du salarié n’étaient pas réunies, invoquant notamment le défaut de caractère désintéressée de la démarche du salarié dès lors que sa période d’essai était en cours de renouvellement et que de nouveaux avantages salariaux étaient en cours de négociation.

La Cour de cassation reprend in extenso, dans le cadre de sa motivation, les dispositions de l’article L. 1132-3-3 démontrant ainsi que le premier alinéa afférent à la dénonciation dans le cadre des fonctions ne fait nullement référence à l’exigence d’une démarche désintéressée, contrairement au lanceur d’alerte mentionné au deuxième alinéa, devant effectuer son signalement dans le respect des conditions posées aux articles 6 à 8 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016, parmi lesquelles figure le caractère désintéressé susmentionné.

En conséquence, le salarié pouvait bénéficier de la protection prévue par l’alinéa 1er de l’article L. 1132-3-3 du Code du travail, du moment qu’il avait relaté les faits sans mauvaise foi, laquelle ne peut résulter que de la connaissance de la fausseté des faits qu’il dénonce et non de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis, peu important qu’il ait ou non agi de manière désintéressée.

Cela étant, il convient de noter que depuis le 1er septembre 2023, la loi n°2922-401 du 21 mars 2022 dite « loi Waserman » a, entre autres, supprimé la condition liée au caractère désintéressée de l’alerte : il est seulement exigé désormais que le lanceur d’alerte ait agi de bonne foi et sans contrepartie financière directe. 

Dernières actualités
Actualité
Coup de tonnerre sur les titres-restaurant
Coup de tonnerre sur les titres-restaurant
3 novembre 2025
Actualité
Passeport de prévention : obligations, conformité et bonnes pratiques pour les employeurs à partir de mars 2026
Passeport de prévention : obligations, conformité et bonnes pratiques pour les employeurs à partir de mars 2026
3 novembre 2025
Actualité
Loi sur l’emploi des salariés expérimentés (ANI) : obligations, conformité et bonnes pratiques pour DRH et dirigeants
Loi sur l’emploi des salariés expérimentés (ANI) : obligations, conformité et bonnes pratiques pour DRH et dirigeants
3 novembre 2025
Guidé par une culture de l’innovation et un esprit résolument tourné vers la solution, Littler conçoit des stratégies RH sur mesure.
Forts d’une expérience solide et d’une expertise pointue, nous partageons avec vous l’essentiel du droit social et droit de la formation professionnelle. Inscrivez-vous pour recevoir nos dernières publications.